Into the Wild

Publié le par Mehdi T

L’Alaska, vastes confins d’une conquête inachevée, est cet état haut perché (le 49ème) sur le continent américain. Un état, avec l’archipel d’Hawaii, désuni des 49 autres. Une singularité qui constituera un appel attrayant, un point de mire expérimental dans l’esprit vagabond du jeune Christopher McCandles. L'Alaska, terre d'élection pour observer un recul avant d'envisager une éventuelle et salutaire ou vaine réconciliation avec ses proches. C’est en s’enfonçant dans l’étendue blanche du Grand Nord que Chris croira assouvir son obsessionnelle quête d’absolu. Chaque pas dans la neige inscrira son effacement progressif de l’humanité. undefinedC’est là qu’il choisira de se poser après deux ans de pérégrinations et de rencontres au gré du tracé de ses élans et de ses lectures (Kerouac, Thoreau, London…). Chris passager d’un bus (sancuaire) abandonné en pleine nature laissera cheminer ses souvenirs.
Into the Wild
est un road movie captivant où les flashs back font incursion dans le quotidien introspectif et isolé (esseulé) de Chris depuis l’épave du magic bus. Sur la route il aura croisé les laissés pour compte, les illuminés, les rêveurs, les destins brisés, les insouciants, les persécutés… tous ceux qui, par leur simple mode de vie, contestent un modèle de réussite sociale et/ou économique (l’ordre établi). Vivre en marge, non plus pour observer la course effrénée de la société (So-ciety) de consommation et de croissance, mais pour s’en détourner, marquer son détachement, glisser vers un désintéressement libérateur. Titiller les frontières, se rassembler dans le désert, travailler clandestinement dans les champs, décrivent autant d’échecs d’une volonté de rompre avec cette société. Les liens que Chris cherche à défaire sont tenaces. La famille biologique qu’il rejette, celle qu’il s’invente ou celle qui se recompose symboliquement au gré des affinités ou par transfert déclinent tous ces liens qui le retiennent encore dans sa fuite. La nature sauvage apparaît alors comme l’aboutissement, LA Destination si longtemps évoquée par détours.
En embrassant les grands espaces qu’il traverse Christopher cherche à communier avec la nature, fuir le monde urbain trop civilisé pour être honnête. Se sauver, échapper à la voie toute tracée agrémentée de conformisme et de confort matériel. Le sauvage est celui qui se sauve. Les chemins de traverse, le hasard des rencontres formulent les ricochets à même de donner l’impulsion au voyage du jeune homme jusqu’à cet ultime refuge septentrional où l’hostilité prendra une nouvelle forme. Car on ne fuit pas la violence, on apprend à la gérer. L’appel de la forêt, selon Jack London, s’adressait au loup domestiqué dont l’instinct refait surface. Le temps d’une fébrilité exaltée l’expérience idéalisée de Chris se confond avec l’animal solitaire. Et il s’agit bien d’une confusion où le mimétisme ne pourra s’assumer sur la durée. La solitude est peut être aussi cette graine qui nous empoisonne plus subrepticement, plus insidieusement encore que la société qu’on n’a pas voulue.undefined

Into the Wild, Sean Penn, 2007.

Publié dans Cinéma

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article